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Dispatches de lord Wellington
à lord Balthurst
Saint-Sever. 1er mars.
L'opinion que j'avais des difficultés qui attendait le
mouvement de l'armée à travers tant de rivières comme elle a dû en passer dans
sa marche en avant, me détermina à passer l'Adour au-dessous de la ville de
Bayonne, malgré les difficultés qui s'opposaient à cette opération. J'étais
d'autant plus amené à adopter ce plan que, quel que fut le mode par lequel je
marchais à l'ennemi, il était évident que je ne pouvais communiquer avec les
ports d'Espagne et les ports du royaume avec Saint-Jean-de-Luz, si ce n'est par
la seule route qui fut praticable en hiver, c'est-à-dire celle allant et venant
de Bayonne.
J'espérais aussi que l'établissement d'un pont au-dessous de
Bayonne me donnerait usage de l'Adour comme port.
Les mouvements de l'armée, comme je l'ai raconté en détail à
Votre Seigneurie dans ma dernière dépêche, avaient pour but de détourner
l'attention de l'ennemi des préparatifs faits à Saint-Jean-de-Luz et à Passages
pour le passage de l'Adour au-dessous de Bayonne et l'amener à porter ses
forces vers sa gauche et ils ont réussi, mais à mon retour à Saint-Jean-de-Luz,
le 19, je trouvai le temps si favorable et la mer si incertaine que je pris le
parti de me déterminer à pousser mes
opérations sur la droite, bien que j'eusse à traverser le Gave d'Oloron, le
Gave de Pau et l'Adour.
En conséquence, je retournai à Garris le 21 et je donnai
l'ordre à la 6e et à la division légère d'abandonner le blocus de
Bayonne et au général don Manuel Freyre de lever les cantonnements de son corps
à Irun et de se préparer à marcher quand la gauche de l'armée aurait passé à
gué l'Adour.
Je trouvai les pontons réunis à Garris et ils furent dirigés
les jours suivants vers et à travers le Gave de Mauléon, et les troupes du
centre arrivèrent.
Le 24, le lieutenant-général sir Rolland Hill passa le Gave
d'Oloron à Viellenave avec les divisions légères, la 2e et la
portugaise, sous le commandement du major général Charles Alten, du
lieutenant-général sir Williams Stewart, et du maréchal de camp Le Cor; tandis
que le lieutenant-général sir Henry Clinton le passait avec la 6e division
entre Montfort et Làas, et que le lieutenant-général sir Thomas Picton avec la
3e division faisait des démonstrations de son intention d'attaquer la
position de l'ennemi au pont de Sauveterre, ce qui amenait l'ennemi à le faire
sauter.
Le maréchal de camp Pablo Morillo repoussa l'ennemi jusqu'à
des postes près de Navarrenx et bloqua cette place.
Le feld-maréchal Beresford, qui après le mouvement de sir
Rolland Hill le 14 et le 15 était resté avec les 4e et 7e
divisions, et la brigade du colonel Vivian en observation sur la basse Bidouze,
attaqua le 23 l'ennemi dans ses postes fortifiés à Hastingues et Oeyregave, sur
la rive gauche du Gave de Pau, et l'obligea à se retirer dans sa tête de pont à
Peyrehorade.
Aussitôt le passage du pont effectué, sir R. Hill et sir H.
Clinton se portèrent sur Orthez par la grande route qui va de Sauveterre à
cette ville. L'ennemi se retira de Sauveterre dans la nuit, traversa le Gave de
Pau et réunit son armée près d'Orthez le 25, après avoir détruit tous les ponts
de cette rivière.
La droite et la droite du centre de l'armée se réunirent en
face d'Orthez : le lieutenant-général sir S. Cotton, avec la brigade de
cavalerie de lord E. Somerset et la 3e division commandée par le
lieutenant-général sir T. Picton, était près du pont détruit de Bérenx, et le
feld-maréchal sir W. Beresford avec la 4e et 7e divisions
sous les ordres du lieutenant-général sir L. Cole et du major général Walker et
avec la brigade du colonel Vivian, se trouvèrent à la jonction du Gave de Pau
et du Gave d'Oloron.
Les troupes opposées du maréchal Beresford s'étant mises en
mouvement le 25, il traversa le Gave de Pau au-dessous de son confluent avec le
Gave d'Oloron dans la matinée du 26, et s'avança le long de la grande route de
Peyrehorade à Orthez sur la droite de l'ennemi. Tandis qu'il approchait, le
lieutenant-général sir S. Cotton traversa avec la cavalerie, et le
lieutenant-général sir E. Picton avec la 3e division au-dessous du
pont de Bérenx. Je fis marcher vers le même point la 6e division et
la division légère; et le lieutenant-général sir Hill occupa les hauteurs
vis-à-vis d'Orthez, ainsi que la grande route conduisant à Sauveterre.
La 6e division et la division légère traversèrent
le gave le 27 au matin, au point du jour, et nous trouvâmes l'ennemi dans une
forte position près d'Orthez, sa droite sur une hauteur, sur la grande route de
Dax et occupant le village de Saint-Boès, et sa gauche sur les hauteurs
au-dessus d'Orthez, dans cette ville, et s'opposant au passage de la rivière
par sir R. Hill.
La disposition des hauteurs sur lesquelles l'ennemi avait
disposé son armée faisait rentrer le centre, tandis que la force de la position
donnait un avantage extraordinaire à ses flancs.
J'ordonnai au maréchal sir W. Beresford de tourner et
d'attaquer la droite de l'ennemi avec la 4e division sous les ordres
du lieutenant-général sir L. Cole, la 7e division sous les ordres du
major général Walker, et la brigade de cavalerie du colonel Vivian, pendant que
le lieutenant-général sir T. Picton marcherait le long de la grande route qui
va de Peyrehorade à Orthez et attaquerait les hauteurs où se trouvaient le
centre et la gauche de l'ennemi, avec la 3e et la 6e divisions
sous les ordres du lieutenant-général sir H. Clinton, soutenues par sir S.
Cotton avec la brigade de cavalerie de lord E. Somerset. Le major général C.
Alten, avec la division légère, gardait la communication et s'établit en
réserve de ces deux attaques. J'ordonnai aussi au lieutenant-général sir R.
Hill de traverser le Gave, de tourner et d'attaquer la gauche de l'ennemi.
Le maréchal sir W. Beresford emporta le village de
Saint-Boès avec la 4e division commandée par le lieutenant-général
sir L. Cole, après une résistance opiniâtre de l'ennemi; mais le terrain était
si resserré que les troupes ne purent se déployer pour attaquer les hauteurs,
malgré les tentatives réitérées de la brigade portugaise du major général Ross
et du brigadier général Vasconcellos; et il était impossible de tourner la
droite de l'ennemi sans étendre excessivement notre ligne. Je modifiai alors le
plan d'action. J'ordonnai à la 3e et à la 6e divisions
d'avancer immédiatement, et je fis marcher la brigade du colonel Barnard, de la
division légère, à l'attaque de la gauche de la hauteur sur laquelle était la
droite de l'ennemi.
Cette attaque, conduit par le 52e régiment aux
ordres du lieutenant-colonel Colborne et soutenue à sa droite par les brigades
du major général Brisbane et du colonel Keane de la 3e division et
par les attaques simultanées faites sur la gauche par la brigade du major
général Anson de la 4e division, et sur la droite par le
lieutenant-général S. Picton, avec le reste de la 3e division et la
6e division commandée par le lieutenant-général H. Clinton, délogea
l'ennemi des hauteurs et nous donna la victoire.
Pendant ce temps-là, le lieutenant-général sir R. Hill avait
forcé la passage du gué au-dessus d'Orthez, et, voyant la marche de l'action,
se porta immédiatement avec la 2e division d'infanterie du
lieutenant-général sir W. Stewart et la brigade général du major général Fane
droit à la grande route d'Orthez à Saint-Sever, maintenant ainsi la gauche de
l'ennemi.
L'ennemi se retira d'abord dans un ordre admirable, en
tirant tout le parti possible des bonnes positions que le pays lui offrait en grand
nombre; mais les pertes qu'il eut à subir dans les attaques continuelles de nos
troupes et le danger dont le menaçait la marche du lieutenant-général sir R.
Hill, précipitèrent bientôt ses mouvements; sa retraite devint à la fin de la
fuite, et ses troupes furent dans le plus grand désordre.
Le lieutenant-général sir S. Cotton profita de la seule
occasion qui s'offrit de charger avec la brigade du major général lord Somerset
aux environs de Sault-de-Navailles, où l'ennemi avait été poussé de la grande
route par le lieutenant-général sir R. Hill. Le 7e hussards se
distingua dans cette occasion et fit beaucoup de prisonniers.
Nous continuâmes la poursuite jusqu'à la brune, et je fis
faire halte à l'armée dans le voisinage de Sault-de-Navailles. Je ne puis
estimer l'étendue des pertes de l'ennemi. Nous avons prix six pièces de canons
et un grand nombre de prisonniers dont je ne saurais dire actuellement le
chiffre. Tous le pays est couvert de ses morts. L'armée était dans le plus extrême
désordre, quand je la vis en dernier lieu traverser les hauteurs près de
Sault-de-Navailles; beaucoup de soldats avaient jeté leurs armes. Depuis, la
désertion a été immense.
Source : "Selections from the dispatches and general orders of Field Marshal The Duke of Wellington" - Lieut Colonel Gurwood - 1851
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