Bataille d'Orthez - 27 février 1814

 

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Témoignages sur la bataille d'Orthez

 

Journal du lieutenant Georges Woodberry
18ème Hussards de la brigade Vivian
Cavalerie de Stapleton Cotton

Puyôo le 26 février 1814 :

« Sortis de Sorde à huit heures du matin, nous côtoyâmes pendant plus de deux milles deux division de l'armée du maréchal Beresford. Nous passâmes le gave de Pau sans opposition, l'ennemi reculant à notre approche. Nous tombâmes sur la grande route d'Orthez près du village de Labatut. Un escadron du régiment fut alors envoyé sur la gauche pour faire une reconnaissance et prendre possession de quelques villages; le reste fit une lieue environ sur le route dans la direction d'Orthez, et on découvrit à ce moment les avant-postes français près du village de Puyôo. L'escadron d'avant-garde, celui de Burke, chargea, Vivian en tête, et chassa le piquet français à travers les rue de Puyôo et de Ramous de la façon la plus brillante, capturant plusieurs hommes et plusieurs chevaux. Au-delà de ces derniers villages, la route traverse une haute colline boisée; quelques fantassins ennemis s'étant montrés, nous abandonnâmes la poursuite, mais nous installâmes un piquet au pied de la colline et la brigade se logea dans les deux villages de Puyôo et Ramous.

Le capitaine Sewell, aide de camp du maréchal Beresford, chargeait en tête du régiment. Ayant oublié son sabre, il prit un manche à balai et s'élança sur l'ennemi, en distribuant force horions.

Les 10e, 7e, 15e de hussard ont forcé le passage de la rivière près de Puyôo et sont ensuite revenu par le gué à Bellocq.

Le vin de l'auberge de Puyôo est excellent. »

Bataille d'Orthez, dimanche 27 février 1814.

« Quand le régiment se mit en marche ce matin, nous prévoyions bien peu qu'une glorieuse victoire serait remportée sur l'ennemi. Grâces soient rendues au Tout-Puissant pour ce bienfait !

On a commencé ce matin par fouetter sept hommes près de Ramous, puis nous avons suivi la grande route dans la direction d'Orthez. Nous avons fait alors notre jonction avec tout le reste de l'armée anglaise et alliée, et nous avons attendu les ordres. Personne n'aurait pu deviner qu'on n"était séparé de l'ennemi qui par un insignifiant monticule.

Vers neufs heures, l'engagement commença et notre brigade quitta la grande route pour occuper une colline à gauche. Pendant que nous la gravissions, nous entendions au loin tonner l'artillerie. Il fallut franchir un ravin à pente très raide en tenant nos chevaux par la tête. Nous entrâmes  alors dans le village de Baigts, qui avait été pris et repris plusieurs fois. Nous vîmes alors l'armée française dans ses positions, déployée d'une façon très imposante : cette vue frappa de terreur plusieurs de mes camarades, j'ai le regret de le dire. A ce moment, le maréchal Soult exhortait ses soldats à bien combattre, je le vis très bien avec ma lunette.

Nous arrivâmes bientôt sous le feu de l'ennemi, Vivian voulant former le régiment au plus près, pour le cas où il aurait fallu charger. Mais les Français nous firent tant e mal avec leur artillerie, que deux escadrons du régiment furent envoyés à l'arrière-garde, et que l'escadron de droite se mis à l'abri, les hommes se tenant au ventre des chevaux dans un fossé boueux. Je vis de là comment les choses se passaient dans la vallée/ Nos braves tirailleurs se maintenaient avec des succès divers.

Le maréchal Beresford et sans état-major se tenaient près de nous, très exposés, car nous étions au centre de la bataille, attendant qu'une division vient à notre secours. Quand elle arriva, nous sortîmes du fossé et nous avançâmes avec elle.

A ce moment l'ennemi se retirait de tous côtés; nous ne pouvions en connaître la cause : c'était le général Hill qui, après avoir passé le gave à Orthez, avait tourné le flanc gauche de l'ennemi après un petit engagement.

La poursuite de l'infanterie continua jusqu'à la tombé de la nuit, aucune occasion de charger ne s'étant présentée pour notre brigade, le 7e de hussards fut plus heureux et ramena environ soixante-dix prisonniers.

La route était jonchée de cadavres; il y en avait, je crois, plus qu'à Vitoria; et pur le temps que dura la bataille, elle fut une des plus meutrières de la campagne.

L'ennemi est en pleine retraite sur Saint-Sever. Il paraît quen dès le commencement, Sout s'est rendu compte qu'il perdrait la bataille et que, connaissant la force de notre cavalerie, il a fait filer la sienne à l'arrière-garde. Elle a donc plusieurs heures d'avance sur l'infatereie et se trouve hors de notre atteinte. Elle occupait la grande route, centre de la position; nous la voyions très distinctement et nous nous attendîmes à un rude combat avec elle.

Nous n'avons pris qu'un nombre insignifiant de canons. Je ne sais comment Soult s'est arrangé pour faire échapper le reste.

La plus grande partie de nos pertes a été faite à l'attaque du centre. L'artillerie ennemie occupait, à côté d'un moulin, une forte position. Il fallut un certain temps avant que nos canons fussent en mesure de battre ce point, mais dès qu'ils se mirent de la partie, les pièces françaises furent aussitôt retirées.

Lord Wellington fut touché par une balle perdue, mais légèrement blessé. Son aide de camp, le compte de March, fut grièvement atteint. Ce beau jeune homme appartient au 52e; apprenant que son régiment allait charger, il demanda à lord Wellington l'autorisation de rejoindre sa compagnie, disant qu'il ne pourrait pas se consoler de ne pas la conduire. Sa requête fut accordée et on connaît le résultat de sa bravoure. J'ai rencontré son frère, lord Lennox, qui allait le voir. Sa douleur faisait peine à voir.

Lord Wellington n'a jamais été plus mal secondé sur le champ de bataille; tous ses aides de camp étaient loin de lui et on l'a vu galoper avec une seule ordonnance. Il était partout où l'on avait besoin de lui.

Mon bagage et mes domestiques se trouvaient, par suite d'une erreur, tout près du régiment pendant l'affaire. Je n'eus qu'à m'en féliciter quand nous reçûmes l'ordre de bivouaquer à trois milles de Saint-Cricq; je pus faire dresser ma tente et tous les officiers vinrent s'y réfugier. Je leur offris un bon souper et presque tous dormirent sous son abri.  »
 

Sources : "Journal du lieutenant Woodberry – Campagnes du Portugal et d'Espagne de France de Belgique et de France (1813-1815)" – Traduit de l'anglais par Georges Hélie – Paris – Librairie Plon - 1896